p0ster #9
Michel Scarpa – Couple holding hands
Intimité, pudeur et pornographie.
le cynisme:
Les couples ont ce défaut, ils marchent fièrement devant vous, l’air sage, innocent et sain. Mais ne vous fiez pas à ce tableau, et surtout pas à ceux qui se donnent la main. Ils n’ont qu’une idée derrière la tête, malgré leur pudeur de gens biens, c’est de se retrouver enfin seul pour se toucher autre chose que la main. En public, faute de pouvoir se tenir le sexe, ils n’ont rien trouvé de mieux que de se tenir banalement par l’index. Ceux qui s’aiment sont lubriques, et l’amour les rend fatalement bête; ils se retrouvent suants et moites de la poignée, à cause d’un manque d’intimité.
le voyeurisme:
Dans ce jeu permanent de distance et de proximité, nous sommes là, tous deux nous font face, une intimité gênante s’installe. Transit, je regarde la scène et j’entre dans le jeu, jeu du sexe, du regardé et du regardeur ; l’image qui, pourtant ne laisse apparaître que deux êtres peau à peau, aussi proches que distants, nous invite à être acteur de l’oeuvre qui nous possède. Dans la recherche d’une intimité qui englobe la société, je te regarde, tu me regardes, ils se regardent durant un acte qu’on ne saurait voir. Le sexe perd alors de son intimité, pour entrer dans la fluidité de l’image. Est-ce là, que des émotions émanant de notre humanité la plus instinctive, nous font perdre notre semblant de pudeur ?
le paradoxe pornographique:
Mais celui qui porte son regard sur ce couple, et ce couple qui semble lui rendre un même regard, est avant tout spectateur ; il est impuissant et ressent cet instant comme une fatalité. Dessein, où l’amour n’a plus sa place dans le sexe, où le sexe devient exhibition, où l’exhibition symbolise le dernier espoir d’un couple prêt à tout pour ressentir la moindre émotion, le moindre plaisir. Le spectateur voudrait bien les aider à s’aimer, les forcer à détourner leur regard froid pour qu’ils soient enfin face à face, et retrouve la chaleur attribut de l’amour, et non la froideur propre à la pornographie.
Julien Robles et Julien Carbone / 2016