Photographe nyctalope, Vladimir Besson se faufile dans les interstices du quotidien et recense les poches de résistance à la surveillance généralisée: sous-bois et bas-côtés, catacombes et squats – autant de lambeaux de cité morte, à peine filtrés par le faisceau d’une lampe-torche. Toujours aux abois, Vladimir fait main basse sur la ville et transfigure la banalité le temps d’un déclic. Sous son objectif, une errance nocturne au bois de Vincennes se transforme en remake de Blair Witch, les arbustes d’un square en forêt gothique, un concert punk-rock en rituel païen ou une gerbe de Coca en ectoplasme. Résurgence de rites séculaires dans la trivialité du quotidien, épouvante de carton-pâte et rictus crapuleux. Solennité de l’idiotie et leçons de ténèbres. Anthropologie macabre, glamour du trois fois rien et lyrisme des chats de gouttière. Petits arrangements avec les morts, du potache au potlatch. Le temps d’un instantané, la grâce se confond à la crasse, dans une tentative de poétiser la vie, de concilier le sinistre et le grotesque, la solennité et l’idiotie – bref, d’exalter les contrastes. Et de faire surgir, dans la profondeur opaque de l’obscurité, les contours d’une comédie humaine, trop humaine. Fin de civilisation, regain d’espoir? Animé d’un romantisme qui lui vient de ses racines slaves, Vladimir nous rappelle que nous sommes tous des lucioles: il faut brûler pour briller.